Le développement des énergies renouvelables est un objectif national majeur réaffirmé dans la Loi Climat et Résilience adoptée en juillet 2021. Il repose sur l’aménagement d’infrastructures dont la durée de service est limitée dans le temps. C’est le cas des éoliennes de grande capacité. Passé 20 à 25 ans, le parc éolien doit être renouvelé. Comment l’optimiser tout en préservant notre environnement ?

L’horizon 2030 est celui d’objectifs majeurs définis dans de nombreux domaines d’activités pour s’adapter au changement climatique et préserver les espaces naturels, agricoles et forestiers. L’éolien fait partie des secteurs où la recherche d’innovations techniques doit permettre d’améliorer la conception des ouvrages en réponse aux objectifs nationaux fixés tels que :

  • Atteindre 40 % de la production d’électricité d’origine renouvelable1
  • Diminuer de 50 % le rythme d’artificialisation des sols2

La production d’électricité renouvelable a sensiblement progressé en 2020, comptant pour plus d’un quart de l’ensemble de la production annuelle d’électricité en France. Les recherches en cours visent à renforcer cette production, en particulier dans le secteur de l’éolien qui est devenu en 2020 la 3ème source de production d’électricité en France. La multiplication par trois des performances des éoliennes en à peine 20 ans a permis d’atteindre aujourd’hui ce niveau de production.

Réutiliser l’emprise au sol d’un parc éolien existant permettrait de réduire la consommation d’espaces et les coûts d’aménagement tout en produisant plus d’énergie

Si l’aménagement de projets sur de nouveaux sites va se poursuivre sur le territoire national, les parcs éoliens existants dont la durée de service est atteinte représentent un potentiel de renouvellement. Leur réaménagement entre 2020 et 2030 est devenu une priorité. Mais sous quelle forme proposer une seconde vie à ces infrastructures ?

Les pratiques actuelles consistent à démanteler entièrement les éoliennes et à aménager de nouvelles fondations sur un autre site pour accueillir une nouvelle éolienne plus grande et plus puissante, impliquant une artificialisation des sols en plus d’un surcoût lié à une nouvelle étude géotechnique et à des démarches administratives supplémentaires.

Un projet de recherche pour des fondations durables

Le projet FEDRE (Fondations d’Eoliennes Durables et REpowering) a pour objectif de trouver des solutions techniques innovantes pour rééquiper des éoliennes existantes en conservant une partie des fondations, et pour dimensionner de nouvelles fondations durables. Ce projet collaboratif, piloté par Antea Group, associe un partenaire académique, l’INSA de Lyon, des entreprises et bureaux d’étude : Nordex, Parex-Lanko, Ménard, CTE Wind. Il est labellisé par le pôle de compétitivité Tenerrdis, basé en région Auvergne-Rhône-Alpes, qui favorise la croissance d’activités durables dans les filières des nouvelles technologies de l’énergie.

L’étude approfondie d’une fondation existante permet de déterminer sa capacité à accepter des charges plus importantes. Elle porte sur les mécanismes développés dans un système complexe constitué par une éolienne, la liaison avec sa fondation, ses éléments de fondation et le sol. La « fatigue » d’une fondation existante est également au programme afin de connaître précisément sa capacité après une certaine durée de service.

Le principal enjeu technique porte sur la fourniture de produits à durée de vie allongée en concevant des fondations d’éoliennes adaptatives.

Une technique innovante pour adapter les fondations existantes aux éoliennes de nouvelle génération

Les fondations des éoliennes étant conçues pour résister aux défaillances grâce aux forces gravitationnelles résultant de leur masse de béton, elles subissent souvent des déformations internes dues à des cinétiques extrêmes.

Une étude réalisée sur le béton au jeune âgea permis de mieux comprendre le comportement global des fondations existantes par gravité des éoliennes, tant en phase de moulage qu’au cours de leur renouvellement par ajout d’une quantité de béton frais. Cette étude a été menée à partir d’une modélisation 3D très élaborée des processus thermo-hydro-mécaniques et chimiques (THMC) effectuée sur le logiciel COMSOL Multiphysics.

Cette modélisation a servi à simuler des évolutions en matière de transfert de masse, d’hydratation, de température, de retrait, de fluage ainsi que de couplage simultané engendrant de potentielles déformations/contraintes au sein de la structure en béton.

Les mesures des températures et de la déformation mettent en lumière l'importance de la prise en compte du comportement du béton au jeune âge. L’approfondissement des connaissances sur les microfissures qui se forment pendant la phase de durcissement du béton apportera un éclairage sur le concept de « fatigue » d’une fondation existante résultant des charges cycliques au fil du temps.

La réalisation d’un modèle de fondation à l’échelle 1/10 au laboratoire GEOMAS de l’INSA Lyon s’est basée sur les propriétés de véritables fondations pour compléter les analyses (simulations numériques, théorie de processus de réduction d’échelle).

Les essais effectués démontrent la possibilité de positionner sur les fondations existantes une masse supplémentaire de béton armé pour soutenir la charge des éoliennes de prochaine génération. Cette technique innovante permettra le renouvellement du parc éolien tout en limitant l’artificialisation de nouveaux espaces, avec un gain économique et de nouveaux horizons pour cette filière.

Les avancées du projet FEDRE présentées au Colloque National Eolien d’octobre 2021

Aujourd’hui, le projet FEDRE compte déjà deux fondations instrumentées - démonstrateurs - sur des éoliennes en exploitation. Le premier démonstrateur a permis de récolter et interpréter plus d’un an de mesures. Un suivi des caractéristiques du béton au jeune âge est effectué sur le deuxième démonstrateur coulé en fin d’année 2020 et opérationnel depuis quelques mois.

Un programme d’essais sera engagé prochainement sur la maquette à l’échelle 1/10 coulée à l'INSA Lyon. Une avancée supplémentaire porte sur l’identification d’une première solution de repowering. D’autres solutions sont actuellement en cours de recherche.


1Loi d’août 2015 relative à la Transition énergétique pour la croissance verte ; Stratégie Nationale Bas Carbone de novembre 2015 qui intègre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050.
2Loi Climat et Résilience de juillet 2021 : le zéro artificialisation nette devra être atteint d’ici 2050.
3 : Phase jusqu’à 28 jours après le moulage au cours de laquelle le béton atteint une certaine résistance.

Pour aller plus loin